Dans un café (L'Absinthe)

Edgar Degas

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Mot clé de l'oeuvre: caféAbsinthe

Présentation générale sur les oeuvres

Dans un café
Autre titre : L’Absinthe
Artiste Edgar Degas
Date 1875-1876
Technique huile sur toile
Dimensions (H × L) 92 × 68 cm
Localisation Musée d'Orsay, Paris (France)


Dans un café1 — dite aussi L’Absinthe — est une célèbre peinture d'Edgar Degas composée entre 1875 et 1876 à Paris et conservée au musée d'Orsay.


Dans un café (ou L'Absinthe) est une huile sur toile de dimension 92 × 68,5 cm. La signature « Degas » apparaît en bas, à gauche, inscrite par le peintre sur la page d'un journal, enroulée sur un tuteur de lecture (ou « porte-journal »).


Les deux personnages représentés, une femme et un homme, sont l'actrice Ellen Andrée et le peintre et graveur Marcellin Desboutin. Tous deux ont été également peints par Édouard Manet. Devant la femme est posé un verre rempli d'absinthe, liqueur verte qui, mêlée à l'eau, prend cette teinte vitreuse et nacrée. On remarque que le regard de cette femme est abattu (vague, elle fixe un point obscur), ou paraît fatigué. L'homme fume la pipe et scrute la salle, à droite, hors-champ. Les tons dominants utilisés par l'artiste sont le gris, le marron et le noir : le gris des marbres des tables de café, des journaux, des rideaux enfumés et des visages ; le marron des banquettes et de la robe ; le noir du costume de l'homme et des ombres.


La scène se passe au café de la Nouvelle Athènes, place Pigalle, alors lieu de réunion des Impressionnistes.


Le titre originel de ce tableau est Dans un café : il fut présenté à la Deuxième exposition des impressionnistes en 1876.


Il est conservé au musée d'Orsay, après être rentré dans les collections publiques par un legs du comte Isaac de Camondo en 1911.


Du point de vue de la manière, Degas innove ici par son traitement atypique du cadrage, ici décentré, dont la violente asymétrie souligne l'isolement des personnages : la main et la pipe de l'homme sont coupées, la table et le journal au premier plan à gauche sont sectionnées de manière antidiagonale. Cette manière de décadrage et de construction du plan de l'image, véritable marque de fabrique de l'artiste, probablement influencée par le développement de la photographie, se retrouve dans de nombreux tableaux de l'artiste comme Le Champ de courses (1876-1887), Fin d'arabesque (pastel, 1876), exécutés après celui-ci, et également conservés au musée d'Orsay.


Degas opère une rupture dans le sujet et la manière, initiant une peinture inscrite dans la réalité et faisant fi des conventions artistiques et de la loi des genres (contrairement à Courbet quelques années auparavant). Degas se rapprochera d'ailleurs du groupe impressionniste et participera à leurs expositions, mais sans jamais adopter leur manière.


A la différence des autres impressionnistes, ses amis, Degas est un peintre foncièrement urbain, qui aime peindre les lieux clos des spectacles, des loisirs et des plaisirs.


Dans un café, lieu de rencontre à la mode, une femme et un homme, bien qu'assis côte à côte, sont murés chacun dans son isolement silencieux, le regard vide et triste, les traits défaits, l'air accablé. L'oeuvre peut être vue comme une dénonciation des fléaux de l'absinthe, cet alcool violent et nocif qui sera interdit par la suite. Ainsi la rapproche-t-on du roman de Zola, L'Assommoir, écrit quelques années plus tard, l'écrivain avouant au peintre : "J'ai tout bonnement décrit, en plus d'un endroit dans mes pages, quelques-uns de vos tableaux." La dimension réaliste est flagrante : le café est identifié, il s'agit de "La Nouvelle Athènes", place Pigalle, lieu de réunion des artistes modernes, foyer intellectuel de la bohême. Le cadrage donne le sentiment d'un instantané pris sur le vif par un témoin assis à une table voisine. Mais cette impression est trompeuse car l'effet de réel est le résultat d'une minutieuse élaboration. Le tableau a été peint en atelier, et non sur place.


Degas a puisé dans ses relations pour tenir les rôles dont il fait des portraits : Ellen André est une comédienne, également modèle pour artistes ; Marcellin Desboutin est peintre-graveur. Le tableau entachant leur réputation, Degas devra préciser publiquement qu'ils ne sont pas alcooliques.


Le cadrage décentré, ménageant des vides et sectionnant la pipe et la main de l'homme, est inspiré des estampes japonaises, mais Degas l'utilise ici pour produire un certain déséquilibre éthylique. Expressive et signifiante aussi la présence de l'ombre des deux personnages, en silhouette reflétée par le vaste miroir dans leur dos.